Le conservateur

Actualités Le Conservateur

Sauver Noël – la France dans l’incertitude

Publié le 19 novembre 2020

Auteur

Valérie Plagnol

Économiste, ancienne membre du Haut Conseil des Finances Publiques

A l’approche de l’hiver, l’amplification de la vague pandémique a touché l’Europe et le continent nord et sud-américain avec brutalité.

L’augmentation vertigineuse de la dépense publique et de la dette pèse sur les perspectives de long terme de redressement de l’investissement et de la croissance potentielle. L’investissement public peut-il indéfiniment pallier ces manques ?

C’était pourtant bien reparti

Malgré les efforts continus de protection, la recrudescence du virus se confirme alors que la rentrée était placée sous le signe du triple rebond : optimisme, mobilité et activité économique. Comme craint, la vitesse de propagation de la pandémie a été plus rapide que celle de la reprise.

Tout comme le virus, la consommation du savon de Marseille ne s’émousse pas. Depuis le début de la crise sanitaire, cette industrie qui a vu ses ventes doubler durant le confinement, se frotte aussi les mains. Le savon authentique a sa définition. L’Union des fabricants de Marseille la défend. Cependant, n’étant un pas un produit agricole, il ne bénéficie pas de la protection des appellations contrôlées ou protégées et ne peut être breveté. Attention aux copies !

Le graphique ci-dessous, indique que la croissance du PIB au troisième trimestre a principalement été portée par la consommation finale intérieure :

Mais ces données cachent une réalité plus fragile.

FRANCE : CONTRIBUTION À LA CROISSANCE DU PIB (gl.an.)

Un confinement moins sévère… mais usant

Comme le montre le graphique ci-dessous, l’arrêt de l’activité en novembre a été moins marqué. Il suffit de marcher dans nos rues pour s’en rendre compte. L’indice de mobilité de Google signale ces différences. Dans l’ensemble, l’enquête de conjoncture de la Banque de France, qui prenait déjà en compte les mesures de couvre-feu, signalait un nouveau repli de l’activité, toujours aussi dispersé suivant les secteurs concernés, mais moins marqué que lors du premier confinement.

FRANCE : MOBILITE DE MARS À NOVEMBRE 2020

Le gouvernement a réactivé un certain nombre de dispositifs d’aides aux entreprises :

En tout, une enveloppe de 20 milliards d’euros a été débloquée, creusant un peu plus le déficit public qui est désormais attendu, selon les prévisions de Bercy, à -11,3 % du PIB fin 2020 contre -10,2 % selon les prévisions de septembre.

La dette publique, quant à elle, devrait atteindre 120 % du PIB fin 2020. Le gouvernement envisage d’ores et déjà de nouvelles aides, notamment en direction des activités de restauration qui pourraient rester fermées durant les fêtes.

Il n’empêche, l’accumulation des fermetures met en péril de nombreuses activités :

L’indice du climat des affaires du mois d’octobre avait déjà montré un léger fléchissement. Sans surprise celui-ci devrait s’accentuer en novembre.

Assouplissement et système D sont les lignes de force de ce deuxième confinement. Accélération également, lorsque la digitalisation atteint des activités jusque-là peu enclines à y recourir.

Les baby-boomers, la génération X, se sont mis à internet, pour les consultations médicales, pour les achats, c’est une vraie transformation. Généralisation du Click and collect, repas à emporter, etc. De quoi limiter les pertes, pas vraiment les éviter. Alors, si le confinement doit être prolongé, ses conséquences seront particulièrement marquées pour les entreprises qui sont dépendantes des achats de Noël. En effet, dans certains secteurs tels que celui de la parfumerie, des jouets, des bijouteries, entre 15 % et 20 % des ventes annuelles sont réalisées au mois de décembre.

FRANCE : INDICE DU CLIMAT DES AFFAIRES (INSEE)

Face à cette situation, sans surprise, l’indice de confiance des ménages se dégrade. Leur moral suit la courbe du chômage, qui a bondi de 7 % au deuxième trimestre et à 9 % au troisième trimestre, en dépit des mesures d’accompagnement et de chômage partiel mises en œuvre. On constate également que les tranches de 15 à 24 ans et les femmes sont plus touchées que les autres catégoriesDans ce contexte, les ménages qui le peuvent continuent d’épargner. Au deuxième trimestre, le taux d’épargne des ménages a bondi jusqu’à 26 % du revenu disponible contre près de 17 % à la veille de la « mise sous cloche ». Les enquêtes montrent que les ménages n’ont que marginalement puisé dans leur épargne cet été, soucieux de préserver un matelas de précaution face au risque de détérioration du marché du travail. La fin de l’année confirmera cette tendance. Difficile donc de sauver Noël. L’incertitude domine et pèse sur les esprits.

FRANCE : INDICE DE CONFIANCE DES CONSOMMATEURS (INSEE)