Économiste, ancienne membre du Haut Conseil des Finances Publiques
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La rentrée a vu l’hésitation grandissante des marchés face à l’apparition de tensions inflationnistes et de risques de disruptions persistants sur les chaînes de production et de logistique.
De fait, la volatilité s’est accrue. L’indice VIX dit « de la peur », qui mesure la « nervosité » des investisseurs, a progressé, tandis que les marchés boursiers ont marqué le pas et que les rendements obligataires se sont tendus (graphique ci-dessous).
Evolution des principaux indices boursiers depuis janvier 2021 (base 100)
Source : Macrobond, V&P
Face à la crise de la pandémie de la Covid-19, les économies avancées ont déployé un arsenal économique d’ampleur inégalée, offrant ainsi un champ d’expérimentation et d’application « grandeur nature » de la théorie du multiplicateur keynésien. A l’heure du bilan, et alors que les risques de résurgence pandémique planent encore, un double constat s’impose :
A front renversés par rapport à 2008, les Etats-Unis et l’Europe sont les moteurs du rebond économique, tandis que la Chine reste en retrait et connaît des à-coups d’activité qui pèsent sur les chaînes de valeur mondiales.
La poussée du rebond de l’activité provoque des tensions inflationnistes et laisse nos Etats lourdement endettés.
Le rapport d’automne du Fonds monétaire international confirme cette double évidence :
d’une part le caractère insoutenable du rythme de croissance actuel, bien au-delà de notre potentiel,
d’autre part le risque que s’agrandisse le fossé entre économies avancées et pays émergents, au regard non seulement de l’accès encore insuffisant de ces derniers à la vaccination, mais également du fait du manque de moyens économiques déployés.
Il ne fait donc aucun doute que la croissance va ralentir sous le coup combiné des contraintes de production et de main d’œuvre, comme du reflux progressif des aides publiques et d’un moindre activisme des Banques centrales. Reste à déterminer – et si possible contrôler – le rythme de ce ralentissement, afin d’éviter un atterrissage trop brutal. En choisissant de mettre en œuvre des plans de relance, incluant des objectifs de moyen terme tels que l’accompagnement de la transition énergétique, les Européens, les Américains et les Chinois entendent mobiliser et orienter les investissements dans cette direction. A l’approche du sommet de Glasgow de la Cop26, la mobilisation et la coopération internationale restent encore incomplètes dans ces domaines, et les progrès insuffisants.
La progression des indices boursiers a marqué le pas depuis la rentrée. Le doute gagne les investisseurs au regard des niveaux de valorisation atteints, de l’apparition de tensions inflationnistes et des craintes de perturbations persistantes sur les chaînes de valeurs mondiales, voire même de pénuries d’approvisionnements critiques. Comme le montre le graphique ci-après, le manque de pièces détachées et de composants a provoqué un net ralentissement de la production automobile, les usines étant contraintes au chômage partiel, alors que la demande reste soutenue.
Ceci s’est traduit par une remontée des rendements obligataires, les marchés craignant que les Banques centrales soient contraintes à une « normalisation » de leurs politiques monétaires plus marquée et plus rapprochée que prévu. Ainsi, a-t-on vu un reflux des capitaux vers le dollar, en hausse face à l’euro notamment. Plusieurs Banques centrales ont déjà dû relever leurs taux directeurs. C’est le cas du Brésil, de la Russie, de la Corée du Sud entre autres. Par ailleurs, certains secteurs sont particulièrement fragilisés : l’immobilier est en chute libre sur les marchés de Hong-Kong et de Chine continentale. Il en est de même du secteur des Big Tech, directement ciblé par la politique de re-réglementation par les autorités. Le secteur du luxe a été affecté par les annonces d’augmentation de la fiscalité sur les plus riches, lancées cet été par le Président Xi Jinping. Enfin, les pénuries d’approvisionnement touchent l’automobile en particulier – en manque de pièces détachées et de semi-conducteurs.
Taux longs à 10 ans
Macrobond, V&P
Le tassement des indices de confiance des directeurs d’achats signale ces hésitations. Aux Etats-Unis comme en Europe, les indices manufacturiers comme ceux des services ont touché un plateau et devraient décélérer d’ici la fin de l’année, reflétant les tensions sur les capacités de production. En Asie, au Japon comme en Chine, la tendance s’avère plus morose. A noter néanmoins que l’accélération de la vaccination et l’espoir de réouvertures des frontières aux voyageurs pourraient faire rebondir les indices des services dans ces régions.
G3 Indices PMI manufacturiers
Macrobond, V&P
De leur côté, la Banque centrale européenne comme la Réserve fédérale des États-Unis jouent l’apaisement. Lors du symposium du 29 septembre dernier, elles sont réaffirmé leur conviction dans le caractère temporaire des hausses récentes des prix. Il n’empêche, alors que l’on sort de la crise aigüe de la pandémie, qu’elles s’apprêtent à mettre fin aux mesures d’urgence qu’elles ont initiées début 2020. Les marchés restent donc aux aguets quant au rythme de ces reflux alors que les besoins de financement des États – émissions de dettes obligataires – vont rester importants dans l’année qui vient.
La crise de la pandémie de la Covid-19, qui s’est traduite par une « mise sous cloche » des économies, a été le terrain privilégié et « grandeur nature » de la théorie du multiplicateur keynésien. En effet, face à la défaillance du secteur privé (en l’occurrence empêché par des fermetures administratives), l’intervention des Etats et les politiques de soutien aux entreprises et aux ménages, ont permis de contenir les faillites et de limiter la hausse du chômage.
Pour la première fois depuis 2014, le prix du baril de Brent a dépassé le seuil des 80 $ en octobre. Plus spectaculaire encore, l’envolée des prix du gaz naturel ne semble plus avoir de limite. En conséquence, les prix de l’électricité, dont la part dans la demande mondiale d’énergie augmente sensiblement chaque année, sont en forte progression. A l’approche de l’hiver dans l’hémisphère nord, la crainte de pénuries pousse un peu plus les prix. La situation actuelle est le fruit de la conjonction de facteurs de court terme, tandis qu’elle révèle également l’ampleur des défis posés par la transition climatique.
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